13 October, 2024

Situation des détenus souffrant de troubles psychiatriques : du Festival de la Moto au Parlement

L’actualité récente sur les conditions de détention des personnes souffrant de troubles psychiatriques a permis au député Franco Seminara de rappeler à la Ministre de la Justice son engagement en leur faveur et ce, dans le cadre de son rôle de parrain du Festival de la Moto à Mons.

Pour la deuxième édition du Festival, Monsieur Seminara a en effet réalisé un partenariat avec l’association « Obra », Asbl ayant mis sur pied un service d’accompagnement des personnes handicapées mentales séjournant au sein de la prison de Gand.

Un chèque leur a ainsi été remis à l’occasion de ce projet social.

Lors de son interpellation à la Ministre Madame Turtelboom, le député a évoqué la condamnation de la Belgique par la Cour européenne des droits de l’homme pour les conditions de détention des détenus souffrant de troubles mentaux :

Ci-dessous, le compte rendu de sa question ainsi que la réponse donnée par la Ministre :

Franco Seminara (PS): Madame la présidente, madame la ministre, la Cour européenne des droits de l’homme vient une nouvelle fois de rappeler à l’ordre notre pays au sujet de la détention de personnes atteintes de troubles mentaux au sein de nos prisons. Les juges de la Cour européenne des droits de l’homme de Strasbourg ont ainsi condamné, ce 2 octobre, la Belgique, au paiement d’une somme de 15 000 euros au requérant pour dommage moral. Ladite Cour a, en effet, estimé que les autorités belges n’auraient pas dû maintenir, durant 7 ans, un homme atteint de troubles mentaux dans des établissements inadaptés, que ce soit en termes de soins ou de réinsertion du requérant, à savoir les annexes psychiatriques des prisons de Gand et de Merksplas.

Dans un arrêt du 22 mai 2007, la cour d’appel de Mons avait également rendu un jugement allant dans le même sens. De plus, dans son rapport de 2009, le Commissaire aux droits de l’homme du Conseil de l’Europe avait fait état de manquements en cette matière et avait recommandé à la Belgique de veiller à un placement et à une prise en charge adaptée des personnes souffrant de troubles mentaux.

Cette année, j’ai eu l’occasion de parrainer et de rendre hommage au travail du centre de jour OBRA qui a mis sur pied un service d’accompagnement des personnes handicapées mentales séjournant au sein de la prison de Gand. Je me fais donc aujourd’hui le porte-parole des associations qui s’inquiètent fortement de la situation des internés dans les annexes psychiatriques des prisons et qui plaident pour la création de nouveaux établissements de défense sociale pour accueillir ces personnes. Elles recommandent à l’État belge de prendre des mesures concrètes pour améliorer la qualité des soins de santé au sein des prisons, ce notamment pour les personnes se trouvant dans les annexes psychiatriques, de lutter contre la surpopulation dans ces annexes et de veiller à la prise en charge adaptée de ces personnes.

Madame la ministre, quelles suites comptez-vous apporter aux recommandations faites par la Cour européenne des droits de l’homme? Combien de détenus souffrant de déficience mentale séjournent-ils encore dans nos prisons? Comment envisagez-vous d’améliorer l’encadrement thérapeutique au sein des annexes psychiatriques? Qu’advient-il de la concession pour l’exploitation des centres spécialisés prévue dans l’accord de gouvernement?

09.03  Annemie Turtelboom, ministre: Madame la  présidente, chers collègues, la problématique des internés ne date pas d’hier. Heureusement, des solutions structurelles sont en voie de réalisation.

Le centre de psychiatrie légale de Gand (272 places) est en construction et devrait être opérationnel en mars 2014. Par ailleurs, le permis de bâtir du CPL d’Anvers (180 places) a été obtenu en mai dernier. Ces dossiers avancent bien.

Les CPL vont véritablement fonctionner comme des hôpitaux psychiatriques avec un niveau de sécurisation basé sur le modèle pénitentiaire. Ceci signifie une amélioration importante de la situation des internés en Belgique puisqu’ils disposeront d’infrastructures adaptées et d’un personnel soignant spécifique.

La prise en charge spéciale permettra également aux internés un transfert plus aisé et plus rapide vers le circuit de soins classique, réduisant d’autant leur nombre en milieu pénitentiaire ou en psychiatrie légale. Je précise néanmoins qu’il restera toujours des internés dans les prisons et ce, en raison des procédures légales, ce qui n’est d’ailleurs pas contraire à la jurisprudence de la Cour européenne des droits de l’homme.

Une personne internée sur décision judiciaire devra attendre la décision de placement de la commission de défense sociale, mais l’objectif est clairement que ce délai soit le plus court possible et que, dans l’attente, les internés continuent à être pris en charge par les équipes de soins rattachées à chaque annexe psychiatrique.

En Wallonie, comme je l’ai déjà annoncé dans ce parlement, un dossier a été lancé afin de construire une extension de 300 places pour l’établissement de défense sociale de Paifve. Les premiers contacts ont été pris mais nous ne sommes qu’au début du projet. Je ne peux donc encore communiquer beaucoup d’informations concrètes.

09.05  Franco Seminara (PS): Madame la présidente, excusez-moi, mais je suis un peu pressé car je dois assister à une autre réunion. Après les grands jours viennent les super grands jours!

Madame la ministre, je vous remercie et je suis heureux d’apprendre cette belle nouvelle. Il y a une remarquable prise de conscience à l’égard de tous ces détenus qui souffrent de troubles mentaux et qui méritent immanquablement une prise en charge adaptée.

Comme je vous le disais dans ma question, en compagnie de l’organisateur du Festival de la Moto à Mons, M. Bevilacqua, dont je suis un parrain modeste du projet social, j’ai eu l’honneur de rencontrer le centre de jour OBRA à la prison de Gand. Celle-ci fait un travail remarquable. J’en profite d’ailleurs pour féliciter toutes les associations, qu’elles soient du Nord ou du Sud du pays, pour leur travail à l’égard des personnes qui en ont le plus besoin. C’est peut-être cela le sens de l’humanité que nous partageons tous.

Lors de cette visite, je me suis rendu compte de l’encadrement accordé à ces détenus souffrant d’une déficience mentale et j’en suis ressorti très ému.