Escroqueries dans le monde de la voyance : Franco Seminara interroge le Ministre Johan Vande Lanotte!
Mardi 27 mars, le député fédéral Franco Seminara a eu l’opportunité d’interroger en Commission de la Chambre des Représentants le Ministre de l’Economie sur les escroqueries liées au monde de la voyance. Cette question fait suite notamment aux articles de presse et aux émissions télévision sorties (par exemple sur la RTBF) à ce sujet, il y a quelques semaines.
Franco Seminara a d’abord rappelé qu’alors que la dernière étude réalisée en 2010 par le CRIOC confirme la propension de nombreux Belges à consulter guérisseurs et voyants, force est de constater que la nature même de cette activité implique dérives et abus. Cela l’avait conduit à interroger le prédécesseur de Monsieur Vande Lanotte qui avait déclaré qu’aucune réglementation ou déontologie propre n’encadrait le domaine de l’ésotérisme.
Avec le contexte de crise que nous connaissons, ce type de service suscite un engouement certain chez tous ceux qui se trouvent dans des moments psychologiquement difficiles. Aujourd’hui, on compte près de deux superstitieux sur dix en Belgique – soit une hausse de 6 % par rapport en 2007, a relaté le député.
Étant donné qu’aucun diplôme particulier n’est exigé, nombre de charlatans jouent de la crédulité ou du désespoir des personnes fragiles en vue de leur soutirer un maximum d’argent. De plus, il n’existe pas d’ordre des professionnels des arts divinatoires, pas plus que d’obligation de concours, d’autorisations ou d’enregistrements. Toutefois, si l’activité de voyant est libre, les pratiques commerciales frauduleuses sont fort heureusement réprimées par la loi, et des plaintes peuvent donc être déposées. Néanmoins, selon la Direction générale Contrôle et Médiation, peu de dénonciations sont établies. À titre d’exemple, de janvier à novembre 2010, seulement sept plaintes ont été enregistrées.
Monsieur Seminara a donc posé les questions suivantes au Ministre : quelles sont les données relatives aux plaintes ayant été soumises à la Direction générale Contrôle et Médiation du SPF Économie? Sont-elles en augmentation depuis 2010? Comment sont organisées les campagnes de prévention et d’information ponctuelles menées par le SPF Économie au sujet des escroqueries dans le monde de l’ésotérisme? Quels moyens spécifiques envisagez-vous pour lutter contre celles-ci – et je rappelle que, le plus souvent, elles ciblent les franges les plus fragilisées de la population?
Dans sa réponse, le ministre Johan Vande Lanotte a affirmé que : » tout d’abord, qu’en Belgique, un voyant ou un tarologue n’est nécessaire que pour former un gouvernement! Pour le reste, ce genre de personne est peu utile! S’il existait – et heureusement ce n’est pas le cas – un diplôme pour ce genre de discipline, l’homme pourvu d’un esprit positiviste que je suis, commencerait à avoir peur!
Cela dit, il est clair que d’aucuns, par désespoir, par naïveté ou pour d’autres raisons, vont consulter des personnes qui exercent une activité qui peut être considérée comme une activité commerciale frauduleuse. S’il s’agit d’escroquerie, celle-ci est un délit qui relève des services de la police et des autorités judiciaires.
Pour le reste, selon mon administration, il faut pouvoir prouver que la personne qui se prétend voyant ou tarologue n’a aucun don et trompe sciemment et systématiquement ses clients. Aspect qui, de manière générale, caractérise, selon moi, ce genre d’individus, mais tel n’est pas le point de vue de mon administration.
Peu de plaintes sont déposées. Le nombre de plaintes reçues par mes services, en 2011, est resté stable. Cela résulte sans doute du fait que si les gens raisonnables savent qu’une consultation chez un voyant ou un tarologue ne les aidera pas, ils font quand même appel à leurs services pour toute une série de raisons. Mais, quand par la suite, ils se rendent compte que les prédictions ne se réalisent pas, ils ne portent pas plainte.
Les plaintes que nous recevons sont surtout liées au prix – estimé excessif par les consommateurs – qui est demandé pour une consultation de voyance ou de tarologie, prix facturé via des numéros de téléphones.
À ce niveau, il faut effectivement veiller à éviter les abus. En effet, si l’administration de l’Économie a autre chose à faire que de se concentrer sur les voyants et les tarologues, les choses sont différentes s’il y a des campagnes sur internet ou par gsm, car se faisant, tout un système de profit basé sur la naïveté des gens est organisé.
Si tel est le cas, le SPF Économie se doit d’agir. Il est responsable de faire cesser ce type d’agissements.
Dans le cadre des missions de prévention et de sensibilisation en matière d’arnaques à la consommation, l’année passée, le SPF Économie a mis au point une campagne concernant les abus en pratiques commerciales, par sms surtaxés par exemple, insistant sur l’importance de vérifier, avant de prendre part à de tels services, les éléments de l’offre qui sont fondamentaux en la matière, notamment en ce qui concerne l’identification du prestataire.
Depuis 2012, nous diffusons régulièrement, sur une page Facebook, des informations et des alertes en matière d’arnaques à la consommation. Ce n’est pas évident. La Commission d’éthique pour les télécommunications vient d’adopter une première décision concernant un service de voyance. Cette décision a été prise à la suite d’une plainte dénonçant le fait que le service était offert au moyen d’un numéro payant n’appartenant pas à la bonne série des numéros téléphoniques. À la suite de cette décision, la Commission d’éthique a demandé à son secrétariat de faire en sorte que les autres services de voyance, travaillant avec les numéros payants sur le territoire belge, soient également contrôlés ».
Franco Seminara a ensuite ajouté qu’il en était conscient et que le ministre l’avait exprimé : » à un moment donné, il y a un problème de délit sur le plan judiciaire, juridique…Toutefois, c’est en tant que ministre de la Protection des consommateurs que je me permettais de vous interpeller sur le sujet. Même si cela peut prêter à rire, dans une société où l’on ignore où l’on va, où l’on tente de savoir où l’on veut aller, où les situations économiques, sociales et psychologiques difficiles sont aujourd’hui multipliées, quand on n’a plus d’espoir d’avoir un travail, une vie sociale ou affective, on recourt vite à ces dérives.
Les chiffres sont inquiétants, d’autant plus que les personnes qui se sont fait avoir dans un système n’iront pas se déclarer, disant qu’elles ont perdu 10 000 ou 20 000 euros pour avoir consulté une voyante car elles voulaient savoir si elles allaient avoir du travail, si elles allaient se marier ou si leur enfant allait être sauvé de la maladie.
Monsieur le ministre, je suis heureux de vous entendre dire qu’il faut continuer à sensibiliser et que des moyens ont été mis en place, notamment via Facebook. Il faut être vigilant.
Si je peux me permettre modestement, en tant qu’hommes politiques, nous avons le devoir de créer une société et d’être à l’écoute des préoccupations citoyennes. C’est notre rôle d’apporter du bien-être plutôt que du vent ou des faux espoirs. C’est pour cette raison qu’il y a un gouvernement et une démocratie. C’est pour que les gens ne se fassent pas rouler mais qu’ils se battent pour leurs valeurs, leurs droits et leur dignité. Voilà pourquoi je m’étais permis de vous poser cette question.
C’est un phénomène malheureusement bien présent. Certaines personnes pas toujours correctes profitent de la faiblesse des autres, d’où l’importance de nous battre tous les jours pour faire en sorte que les injustices diminuent. C’est ce que nous essayons modestement de faire tous les jours, que ce soit en tant que ministre ou parlementaire. C’est une vraie préoccupation citoyenne. Je préfèrerais que les nombreuses personnes désespérées se tournent vers les associations ou le monde politique qui pourront leur apporter des réponses beaucoup plus claires plutôt que d’aller vers de la fantaisie et des gens qui profitent de leur faiblesse ».