17 April, 2024

Licenciements abusifs dans les grandes surfaces

Le Député fédéral Franco Seminara a interpellé  la Ministre de l’Emploi Joëlle Milquet sur « les licenciements abusifs constatés dans certains magasins de la chaîne Lidl »

Dans le courant du mois d’octobre, après constatation du District Manager, le gérant du Lidl situé à Montegnée a été licencié pour avoir été en possession de deux oranges, de trois poires et d’une mangue en provenance du magasin. Ces fruits, classés au préalable en « pertes », étaient destinés à la décharge.

Selon un communiqué de la direction de Lidl, « Les produits qui ne satisfont pas aux critères établis sont retirés de la vente et doivent être détruits. Les gérants sont en outre responsables de la mise en œuvre des directives internes et doivent montrer l’exemple ».

Selon le délégué syndical de la CNE pour Lidl Wallonie, Il n’y a pas eu vol vu de fruits puisque ceux-ci n’ont pas été consommés. Le motif de la « faute grave » a finalement été abandonné mais le licenciement a été maintenu.

Toujours au sein de la même enseigne, le mois suivant, cinq personnes travaillant au Lidl de Libramont ont été licenciées pour faute grave pour avoir emporté, en août dernier, des produits qui ne présentaient plus les conditions requises de vente en raison d’une panne de frigo et qui étaient donc destinés aussi à la destruction.

Après une enquête du District Manager, après une suspension de travail et de salaire, les personnes concernées ont été licenciées pour faute grave.

Même si les consignes des chaînes de distribution sont explicites en la matière, le Député fédéral a souligné la disproportion entre la faute et la sanction et lui a demandé si des dispositions légales ne pourraient pas être renforcées ou précisées afin d’éviter le recours abusif à la notion de « faute grave ».

« Une conciliation est toujours possible »

Madame Milquet, embarrassée, répond que malgré l’importance et l’intérêt qu’elle porte à la problématique, précise que la question est très délicate. En effet, la séparation des pouvoirs limitent son champ d’actions dans la notion de « faute grave ». En effet, seuls les tribunaux peuvent confirmer si, le cas échéant, il s’agit d’un tel acte.

Sur le plan moral, la Ministre de l’Emploi et de l’Egalité des chances partage le désarroi du Député fédéral face à ces licenciements et ce gaspillage de denrées alimentaires.

La Ministre a également déploré le manque d’informations fourni aux ouvriers et employés concernés car ils étaient en mesure de réclamer une conciliation : avant même d’en arriver à un traitement judiciaire de ce genre d’affaires, un recours en justice est toujours possible. Le tribunal peut se prononcer sur l’existence de la faute grave et le cas échéant sur un dédommagement complémentaire, les personnes concernées peuvent demander une conciliation. Il est dommage qu’elles ne l’aient pas fait dans ce cas-ci. Il faudrait peut-être aussi mieux informer, notamment dans les grands magasins car ce n’est pas un cas unique. Mes services ont déjà eu cinq cas de conciliation dans une autre enseigne de grands magasins pour des faits absolument identiques.

Chaque magasin de distribution semble être terriblement strict vis-à-vis de telles pratiques qui peuvent paraître totalement banales à d’autres personnes, comme nous par exemple. Il y a là donc matière à réflexion ! Il s’agit d’aliments qui sont, de toute façon, destinés à être détruits. Or, apparemment, c’est souvent le même genre de licenciement qui est organisé quand on a constaté un vol d’aliments périssables.

Le mieux est de se dire, pour de tels cas, que la conciliation sociale existe et permet d’éviter un licenciement pour faute grave, voire de trouver un terrain d’entente et d’éviter ce genre de licenciement ! Au pire, lorsqu’il a eu lieu, il est toujours possible de s’y opposer par voie judiciaire. Celui qui a le dernier mot, c’est le tribunal.

En guise de réponse, le Député fédéral Franco Seminara, tout en admettant que la notion de « faute grave » a été retirée dans ces cas de figure, s’est permis de souligner que les concernés ont été tout de même sévèrmerement sanctionnés, voire remerciés…

Madame la Ministre, même si la sanction de vol n’est pas à bannir des règlements d’ordre intérieur des grandes surfaces, nous parlons ici de denrées alimentaires déclassées et destinés à moisir dans une poubelle. Dés lors, je ne peux que déplorer la disproportion entre la faute professionnelle commise et la sanction appliquée…Symtômes d’une Société qui voit chaque jour la lente érosion des valeurs d’humanité et de solidarité ! Selon le CRIOC, un demi-milliard de tonnes de denrées alimentaires est invendu par an en Belgique…c’est inadmissible !

La Ministre Joëlle Milquet partage le sentiment du Député fédéral Franco Seminara : En effet, cher Collègue, ce chiffre fait froid dans le dos. De plus, ce sont des tonnes entières qui partent aux Pays-Bas, où se trouvent d’énormes hangars de destruction. C’est quelque chose de très heurtant. Une faible partie est distribuée aux banques alimentaires, mais fondamentalement ces aliments invendus sont détruits. C’est un problème de société de consommation occidentale.

Pour conclure, outre la disproportion entre la faute professionnelle évoquée par les responsables de cette grande surface, le chiffre colossal cité prouve encore une inégalité flagrante entre une infime partie de la population qui ne mange pas à sa faim et celle qui gaspille des denrées alimentaires.